Tout savoir sur Norsys et ses représentants de la nature

Le 12 novembre 2024, la société Norsys annonçait la nomination d’un représentant de la nature au sein de son conseil d’administration. Il s’agissait alors d’une grande première en France — et même d’une première à l’échelle européenne, puisque la nature se voyait simultanément représentée dans plusieurs organes de gouvernance de l’entreprise. Explications.

Sylvain Breuzard, premier dirigeant français à avoir invité un représentant de la nature au CA.

UNE NATURE ACTIONNAIRE DOTÉE D’UN ADMINISTRATEUR

Sylvain Breuzard, le fondateur de Norsys, est l’instigateur du concept de permaentreprise, un modèle de développement économique stimulant la création de valeur sociétale et environnementale. Aussi, lorsqu’il a découvert notre ouvrage « La nature au travail », accueillir un représentant de la nature lui est apparu comme une évidence. Puisqu’en vertu de la permaentreprise, une voix est donnée aux salariés dans la gouvernance, pourquoi ne pas faire de même pour la nature ? 

C’est dans ce contexte qu’il a été décidé de recruter un administrateur indépendant en charge de représenter la nature au sein du conseil d’administration de l’entreprise. Le fondateur de Norsys a toutefois estimé que cette innovation pourrait être synonyme de greenwashing. En effet, un administrateur indépendant peut être démis de son mandat, et ne dispose jamais que d’une voix minoritaire au sein du conseil. Ce risque a donc conduit l’entreprise à prendre deux initiatives hors du commun.

Norsys a en effet décidé de positionner la nature comme un actionnaire. Car comme le disait si bien Sylvain Breuzard lors d’un évènement au Palais de Tokyo : « La seule partie prenante qu’on ne peut pas virer, c’est l’actionnaire ». Pour ce faire, l’entreprise s’est appuyé sur une fondation d’intérêt général, détenant 10% du capital de Norsys. C’est donc cette fondation qui désigne et mandate un représentant de la nature auprès du conseil d’administration. Grâce à ce montage juridique, la nature restera actionnaire quoi qu’il arrive, même si la personne chargée de ce mandat change.

Par ailleurs, l’entreprise ne souhaitait pas accueillir un administrateur nature dont la portée resterait symbolique. Ce nouvel administrateur disposant d’un droit de vote minoritaire, équivalent à 10% des actions, il a donc été décidé de lui accorder un droit de veto sur certains sujets. Ce dispositif, inspiré du modèle anglo-saxon de la « golden share » donnant habituellement un droit de veto sur l’évolution du capital ou sur la sélection des dirigeants, a été réinterprété chez Norsys sous la forme d’une « green share », donnant également un droit de regard sur la stratégie environnementale de l’entreprise.

Et c’est précisément cette décision pionnière qui a valu à Norsys (et son représentant de la nature) d’être invité au journal télévisé de TF1.

UN HAUT CONSEIL POUR LA NATURE

Conférer un statut d’actionnaire à la nature constitue la solution la plus ambitieuse à ce jour pour rééquilibrer le rapport de force entre les enjeux économiques et écologiques. Norsys était toutefois conscient de l’existence d’autres scénarios, et s’en est pleinement emparé. Parmi ces scénarios alternatifs figure notamment celui consistant à penser la nature comme une partie-prenante parmi tant d’autres, au même titre que les salariés, les fournisseurs ou les territoires.

En novembre 2024, l’entreprise disposait déjà de multiples organes de gouvernance permettant de donner voix à ces diverses parties prenantes, notamment : un comité éthique, un comité de mission, et un comité perma-entreprise. Il a donc été décidé de recruter d’autres représentants de la nature, pour siéger dans chacun de ces organes. Au total, ce sont ainsi huit personnes aux profils et expertises variées, qui ont été sélectionnées pour représenter la nature, et ainsi mieux diffuser le changement à différents endroits de l’entreprise.

Mais ces multiples représentants de la nature ont une autre fonction : celle de créer un débat contradictoire et de délibérer avant de porter un avis ou une décision auprès du conseil d’administration. En effet, chez Norsys comme partout où intervient notre équipe Corporate Regeneration, nous estimons qu’il serait déraisonnable de représenter la nature par l’intermédiaire d’un individu unique. Les problématiques écologiques sont éminemment complexes, elles nécessitent donc une multiplicité de regards et de compétences pour être traitées sérieusement. C’est tout l’enjeu de ce collectif de représentants recrutés par Norsys, réunis sous forme d’un Haut Conseil pour la Nature.

Découvrez ci-dessous un interview de Sylvain Breuzard pour en savoir plus sur ce  Haut Conseil.

LAST BUT NOT LEAST : UNE NATURE SYNDIQUÉE

Dans les entreprises françaises, le pouvoir n’est pas l’unique apanage des actionnaires ou des dirigeants. En vertu d’une longue et parfois tumultueuse histoire, ce pouvoir est partagé avec les représentants du personnel, qui œuvrent à des prises de décision plus démocratiques. Norsys a donc choisi de mobiliser les syndicats pour mieux représenter la nature, mobilisation d’ailleurs encouragée depuis la loi de 2021 portant sur le dialogue social environnemental en France.

Dans cette optique, les élus du personnel ont désigné un salarié dont la mission est de participer aux travaux et délibération du Haut Conseil pour la Nature, mais aussi de négocier les accords d’entreprise touchant aux questions environnementale. En la matière, Norsys se conforme bien entendu aux directives fixées par la loi n°2021-1104 du 22 août 2021, et à celles déterminées par l’accord national interprofessionnel du 11 avril 2023. Mais l’entreprise a par ailleurs voulu aller plus loin.

En partenariat avec la CFDT, et plus particulièrement avec le mouvement écosyndicaliste des Sentinelles Vertes initié par Michael Pinaut, Norsys a ainsi mis en place un « permadialogue ». Inspiré du modèle de permaentreprise, cette méthode de dialogue social vise à simultanément prendre soin des humains, à préserver la planète, et à partager les richesses. Au programme des négociations portant sur les questions écologiques, par-delà les habituelles questions afférentes au bilan carbone et aux mobilités douces, se trouvent notamment : l’éco-conception des produits et services ; les achats responsables ; la préservation de la biodiversité ; et… la représentation de la nature dans la gouvernance, bien entendu ! 

QUELS REPRÉSENTANTS ? QUELS IMPACTS ?

Qui sont les représentants de la nature chez Norsys ? Comment ont-ils été choisis, sur quels critères ? Quels sont les impacts qui ont été apportés par cette innovation ? Le droit de veto a-t-il déjà été utilisé ? Nombreuses sont les questions qui nous sont régulièrement posées sur l’initiative pionnière de Norsys. Ne pouvant pas répondre exhaustivement à toutes ces questions dans le cadre d’un article de blog, nous vous invitons à nous suivre sur les réseaux sociaux, où à nous contacter directement par email.

En attendant, vous pouvez également creuser le sujet en participant à notre formation pour devenir administrateur nature et rejoindre le mouvement !


Corporate ReGeneration imagine et met en oeuvre des organes de gouvernance à impact donnant une voix aux générations futures et à la nature au sein des entreprises. Vous êtes intéressé par le sujet et souhaitez évoquer la possibilité d’une telle initiative ? Contactez-nous.

Suivant
Suivant

Donner la parole aux jeunes : l'initiative du “Youth Sounding Board” d'Enabel